Construire un Business Plan professionnel
Table des matières
1. Qu'est-ce qu'un business plan ?
Chez Reportly, lorsque l'on parle de Business Plan, on parle de la modélisation financière permettant de tester la validité de votre modèle économique et de ses besoins de financement. Cette modélisation prend la forme d'un fichier Excel structuré en plusieurs onglets interconnectés, vous permettant de piloter stratégiquement votre croissance sur 3 à 5 ans avec une granularité mensuelle.
Pour y parvenir, il faudra bien évidemment avoir de quoi argumenter vos hypothèses. Tout le travail relatif à l'analyse de votre marché (potentiels volumes de vente, pricing, churn ) ou du marché en général (coûts de la main d'œuvre, loyers, taux d'intérêt) devra être mené au préalable. Certains fondateurs choisissent de formaliser ce travail d'analyse dans un document Word synthétique présentant leur vision stratégique, leur analyse de marché et leur étude de la concurrence. Cette approche peut s'avérer utile pour contextualiser les chiffres et partager votre vision avec vos investisseurs.
La puissance du format Excel réside dans sa capacité à projeter vos états financiers de manière dynamique. Vos hypothèses de croissance alimentent automatiquement votre compte de résultat, qui lui-même impacte votre flux de trésorerie et votre bilan. Lorsque vous modifiez un paramètre, comme votre taux de churn ou votre prix moyen par utilisateur, l'ensemble de votre modèle se recalcule instantanément. Cette approche vous permet non seulement de calculer automatiquement vos unit economics et métriques clés, mais surtout de tester différents scénarios de croissance pour comprendre leur impact sur votre trajectoire.
2. Structure complète
Un Business Plan doit répondre à certains critères « techniques » pour être vraiment opérationnel. La lisibilité permet au lecteur de trouver l'information facilement, la granularité assure un niveau de détail suffisant sans nuire à la clarté, et la cohérence garantit que tous les onglets sont interconnectés et que les formules se calculent correctement d'un bout à l'autre du modèle.
En termes de contenu, l'idée finale étant de modéliser vos trois états financiers (compte de résultat, bilan, flux de trésorerie), le BP devra contenir non seulement lesdits états financiers mais tous les éléments ayant conduit à leur rédaction.
Le compte de résultat
Pour construire votre compte de résultat, il vous faudra la modélisation du chiffre d'affaires, celle des coûts variables (onglet Business Model dans nos templates), vos coûts fixes (onglets OpEx et HR ), vos amortissements (onglet CapEx & D&A ), et les intérêts (onglet Financing ).
Le compte de résultat projette votre rentabilité mois par mois. Il part de vos revenus récurrents annualisés, desquels il soustrait vos coûts variables pour calculer votre marge brute, puis vos coûts fixes pour arriver à votre EBITDA ou résultat opérationnel. Ce tableau se construit automatiquement à partir de vos hypothèses et intègre votre plan d'embauches.
Le flux de trésorerie
Les flux relatifs à l'opérationnel proviennent des onglets précédemment mentionnés, modulo des échéanciers de paiement et de facturation à l'origine du besoin en fonds de roulement. Les flux liés à l'investissement proviennent de l'onglet CapEx et ceux du financement sont issus de l'onglet Financing .
Le flux de trésorerie est souvent négligé au profit du compte de résultat, alors qu'il représente une dimension critique pour la survie d'un SaaS en croissance. Il suit l'évolution de votre cash mois après mois en partant de votre trésorerie de début de période, en ajoutant vos encaissements et en soustrayant vos décaissements. Un SaaS peut afficher un EBITDA positif tout en connaissant des difficultés de trésorerie, notamment à cause des décalages de paiement. Il est donc essentiel de maintenir un runway d'au moins 12 mois.
Le bilan
Le bilan, quant à lui, n'étant que la consolidation de tous les onglets précédemment mentionnés, il se suffira à lui-même. Il projette votre situation patrimoniale en listant d'un côté vos actifs (trésorerie, créances clients, immobilisations) et de l'autre votre passif (dettes fournisseurs, emprunts) ainsi que vos capitaux propres (capital social et résultats accumulés). Bien qu'il soit généralement moins scruté par les investisseurs que le P&L ou le cash flow, il reste nécessaire pour avoir une vision complète de la santé financière de votre entreprise.
3. Modélisation
L'ordre dans lequel nous suggérons de modéliser n'est que le reflet de la philosophie du BP : « Nous avons des ambitions de chiffres d'affaires, voici les ressources dont nous aurons besoin pour délivrer, d'abord opérationnelles, et ensuite financières. »
3.1 Business Model
Il s'agit du cœur du réacteur ici car les deux agrégats modélisés ici, chiffre d'affaires et coûts variables , déterminent la marge brute, elle-même premier proxy de la viabilité de votre business.
Chiffre d'affaires
D'abord nous allons chercher à déterminer les volumes d'acquisition mensuels pour ensuite leur appliquer des métriques de rétention nette ( NRR ).
Note : Supposant que la pratique de marché soit d'objectiver les équipes de vente au New MRR et celles du Customer Success à l'upsell/cross-sell, ce modèle ne fera intervenir que des notions fiduciaires comme paramètres et la vision nombre de clients acquis/perdus ne sera que des indicateurs retro-engineered.
Les quatre hypothèses clefs seront donc :
- New MRR mensuel
- Churn MRR mensuel
- Upsell MRR mensuel
- Downsell MRR mensuel
La valeur indiquée correspondra à la valeur mensuelle de fin d'année, permettant ainsi de faire des évolutions linéaires entre chaque année.
L'idée est de créer des cohortes de MRR auxquelles nous appliquons le NRR évolutif. Ainsi, nous obtiendrons un MRR mensuel, qui sommé sur 12 mois, donne le chiffre d'affaires.
En appliquant la formule suivante, nous serons capable de retro-calculer le nombre d'utilisateurs :
Coûts directs
Ici, nous intégrons les coûts d'hébergement et de Customer Support (pas Success), sans lesquels le produit ne pourrait tourner.
Pour les coûts d'hébergement , on utilisera un coût moyen par utilisateur.
Tandis que pour le Customer Support , nous allons plutôt utiliser un nombre de clients (ou utilisateurs) couverts par CS par mois. Cela déterminera le nombre d'employés et le coût associé se fera dans l'onglet HR.
3.2 Human Resources
Parce que vos équipes sont votre force.
Équipe
Ici nous allons modéliser les équipes, que nous classifions selon les Business Units : Tech & Product , Sales & Marketing , Customer Success , SG&A .
Parmi ces business units, seuls les Sales (SDR, AE) et les CSM seront pilotés de manière programmatique, sur la base d'objectifs de new MRR et upsell MRR respectivement.
Quant aux autres, ils seront pilotés au nombre de postes ouverts à la fin de l'année avec une évolution linéaire.
Salaires bruts
Ici les deux uniques hypothèses sont les salaires bruts annuels moyens à chaque poste ainsi que l' augmentation annuelle moyenne de ces salaires.
Bonus
Bien qu'habituellement les bonus concernent plutôt les Sales et les CSM, nous avons délibérément laissé la possibilité d'ajouter des bonus pour les autres postes.
Qui plus est, il est présumé que le versement de ce bonus se fait trimestriellement pour simplifier le modèle.
Salaires chargés
Ici les calculs se font automatiquement selon un barème de l'URSSAF et les sommes brutes versées à vos employés.
3.3 OpEx (excl. HR)
Pour la majorité des charges d'exploitation il est généralement préférable de budgéter à l'année, au trimestre ou au mois. Cela dépend de vos habitudes de budgétisation ainsi que la ligne dont il s'agit. Quoi qu'il en soit, le modèle étant conçu pour donner de la visibilité mensuellement, ces budgets seront automatiquement convertis en valeurs mensuelles puis consolidées annuellement.
Certains postes tels que le Loyer ou encore les coûts software , quant à eux, seront budgétisés par employé garantissant ainsi la cohérence des charges de structure au fil de la croissance.
Quant aux coûts marketing , ceux-ci seront drivés par le coût d'acquisition client ( CAC ). Si votre stratégie d'acquisition se porte uniquement sur de l'outbound (équipe sales), alors la valeur de ce CAC pourra rester à 0€.
Ainsi, la distinction entre les charges fixes et les semi-directes (évoluant en fonction de la taille des équipes, elles-mêmes évoluant en fonction du nombre de clients) sera introduite.
3.4 CapEx (et D&A)
Bien que les activités de SaaS ne nécessitent pas d'investissements majeurs par essence, certaines dépenses tels que le matériel informatique (si pas en leasing) se doivent d'être amorties.
Ainsi les outputs de cet onglet seront les actifs immobilisés, les D&A associés (pour le PnL) et par conséquent les actifs nets immobilisés (pour le bilan).
Note : La production immobilisée n'est volontairement pas intégrée dans ce modèle, car il s'agit d'un artefact comptable non-cash, propre à certains pays, dont la France.
3.5 Profit & Loss (PnL)
Cet onglet est la démonstration de la viabilité économique de votre modèle. Il s'agit d'un onglet output, qui regroupe les outputs des onglets suivants :
3.6 Cash Flows Statement
Cet onglet reflète davantage la réalité économique de votre entreprise que le compte de résultat. Dans le cas des SaaS, le flux de trésorerie central est le flux de trésorerie opérationnel, qui découle du compte de résultat.
Ainsi, qu'il s'agisse de vos revenus et de vos coûts, seront désormais intégrés les délais de facturation et de paiement, donnant ainsi naissance au Besoin de Fonds de Roulement . La variation de ce besoin génère une composante du flux de trésorerie opérationnel inversement proportionnelle. Par exemple si votre BFR passe de 60K€ à 90K€ entre deux périodes, alors votre flux de trésorerie opérationnel sera diminué de 30K€ entre ces deux périodes.
Le flux de trésorerie relatif aux investissements est ni plus ni moins que les valeurs de l'onglet CapEx and D&A.
Enfin, le flux de trésorerie relatif au financement. Ce flux dépend des deux flux précédemment mentionnés, car comme son nom l'indique, il servira à financer vos opérations et les investissements nécessaires pour mener à bien votre activité. Voir section « Financing » pour plus d'informations.
3.7 Financing
Bien que le traitement de cet onglet arrive « tardivement » dans le flow du traitement, il est néanmoins clé. Clé car la philosophie même d'un business plan (voire d'un business tout court) est de déterminer les besoins financiers que requiert votre ambition.
Ainsi sur la base des flux de trésorerie opérationnels et d'investissement, vous pourrez déterminer les besoins de financement de votre entreprise.
Si la somme de vos flux de trésorerie susmentionnés est négative, vous devrez aller chercher du financement à la hauteur de 1.1x * de ladite somme. Si elle est positive, chaque euro de financement supplémentaire servira à booster votre croissance. Une boucle de rétroaction est alors introduite : si le business est rentable, vous allez chercher à acquérir davantage de clients, impliquant davantage de coûts, réduisant temporairement votre niveau de rentabilité et donc vos flux de trésorerie opérationnels et par conséquent, vos besoins de financement grandiront.
Il existe une multitude de moyens de financement, ainsi par souci de simplicité, notre modèle se concentre sur les 4 suivants :
Augmentation de capital
Bien que les fonds levés n'impliquent pas de poids financier supplémentaire sur votre activité, il réduira, dans le cas où votre entreprise serait couronnée de succès (ce que l'on vous souhaite !), votre patrimoine en tant qu'actionnaire fondateurs. Il s'agit donc d'une autre perspective de « coût ».
Dette bancaire (ou Obligations)
Le concept est simple, vous empruntez des fonds à une banque (dette bancaire) ou à des investisseurs (obligations) en échange de quoi, vous devrez rembourser le capital (sur une période et à une fréquence prédéfinies ** ) et les intérêts associés (sur la base d'un taux d'intérêts, lui-même prédéfini).
Obligations convertibles
Il s'agit d'obligations qui confèrent la possibilité aux parties prenantes de convertir la dette en capital *** (si le business délivre la promesse tenue au moment de la levée de fonds) ou de conserver la forme de la dette en dette **** (remboursement du capital et paiement des intérêts).
Subventions
Il est commun que des institutions étatiques, régionales voire locales, supportent des business qui promettent de dynamiser l'économie aux échelles susmentionnées. Alors que certaines sont dédiées au financement de l'innovation, d'autres sont des avances remboursables (souvent à taux 0%), offrant ainsi un moyen alternatif de financer le besoin en fonds de roulement (BFR) ou les flux opérationnels temporairement négatifs.
Notes :
(*) Est intégrée une marge de sécurité de 10%. Cette marge peut naturellement être revue à la baisse (mais cela pourrait s'avérer problématique car vous aurez moins de marge de manœuvre dans le cas où votre plan ne se déroulerait pas comme prévu), ou à la hausse (mais sur-financer peut s'avérer coûteux, qu'il s'agisse de capital cédé ou du poids de la dette sur votre activité).
(**) Il est commun que le remboursement du capital et le paiement des intérêts se fassent mensuellement, trimestriellement voire semestriellement, respectivement et indépendamment l'un de l'autre. Le modèle intègre aussi la possibilité d'un remboursement du capital in fine (100% du capital remboursé en une fois à une date prédéfinie) bien que moins probable pour une jeune entreprise.
(***) Il est possible que les termes du contrat obligataire prévoient de convertir en capital non seulement le principal emprunté mais les intérêts générés entre la contraction de la dette et sa conversion. Il est aussi possible que ces intérêts soient capitalisés, c'est à dire que les intérêts de la deuxième année ne soient plus calculés sur la base du principal, mais sur celle du principal augmenté des intérêts générés lors de la première année (et ainsi de suite). Sachez que ces obligations convertibles sont systématiquement sujettes à une date de fin, représentant en quelque sorte la période d'essai offerte par les investisseurs aux fondateurs pour que ces derniers délivrent leurs promesses opérationnelles.
(****) Une obligation convertible ayant comme objectif d'être convertie, sa non conversion représenterait donc un échec d'investissement et par conséquent, de nombreux fonds intègrent une prime de non-conversion (PNC) pour s'assurer un rendement sur ce vecteur de financement. Par exemple, vous empruntez 100K€ à un fond, avec 10% de taux d'intérêt et 15% de PNC. Si ces obligations ne sont pas converties à date de péremption (1 an plus tard dans cet exemple), alors votre entreprise devra rembourser 100 × (1+ 10%) × (1 + 15%) K€, soit 126,5K€.
3.8 Balance Sheet
Le bilan est la représentation du patrimoine de l'entreprise à un instant donné et les moyens déployés pour le créer.
Ainsi cet onglet, bien que moins important que le PnL et le Cash Flow Statement pour des entreprises SaaS/digitales, sera quasi systématiquement demandé par les banques dans le cadre d'une levée de dette bancaire.
La Balance Sheet centralise toutes les valeurs de balance, et non de flux, des autres onglets mentionnés dans ce guide.